February 13, 2025

Le Bouard Avocats

Cession de titres après transformation d’une société : quelle nature juridique retenir ?

Comment déterminer la nature des titres sociaux après la transformation d’une société ?

La date du transfert de propriété est déterminante : La nature juridique des titres sociaux doit être appréciée au jour du transfert de propriété, indépendamment de la date d’enregistrement de l’acte de cession.

La transformation de la société modifie la qualification des titres : Une SARL transformée en SAS entraîne un passage des parts sociales aux actions, influençant notamment le régime fiscal applicable à la cession.

L’opposabilité de la transformation n’impacte pas la qualification des titres : La Cour de cassation rappelle que l’absence de publicité immédiate au RCS n’empêche pas la prise en compte de la nouvelle forme sociale pour le calcul des droits d’enregistrement.

Lorsqu’une société fait l’objet d’une transformation juridique, la question de la nature des titres sociaux se pose inévitablement en cas de cession. Une société à responsabilité limitée (SARL) peut ainsi être transformée en société par actions simplifiée (SAS) sans que son activité ne change. Cependant, au moment de la cession des titres, faut-il considérer leur nature au regard de la forme initiale de la société ou bien en fonction de la forme juridique en vigueur au moment du transfert de propriété ?

Cette question n’est pas anodine, notamment en matière fiscale, où le régime des droits d’enregistrement diffère selon la forme sociale de la société cédée. Une récente décision de la Cour de cassation rappelle un principe fondamental : la nature juridique des titres cédés doit être appréciée à la date du transfert de propriété, et non à celle de l’enregistrement de l’acte de cession.

À travers cet article, nous analyserons les enjeux fiscaux et juridiques de cette règle, les conséquences pour les parties à la cession, ainsi que les précautions à prendre pour éviter tout contentieux. Pour ce genre d'opération, il est recommandé de demander conseil à un avocat expert en matière d'opérations sur capital.

A lire : Attributions gratuites d’actions : un régime distinct de l’augmentation

cession de titres après une transformation

La transformation d’une société et son impact sur la nature des titres sociaux

Définition et effets juridiques d’une transformation de société

La transformation d’une société consiste à changer sa forme juridique sans créer une nouvelle entité. Ce mécanisme est prévu par l’article L. 210-6 du Code de commerce, qui précise que la société transformée conserve sa personnalité morale et continue d’exister sous une nouvelle forme.

Une SARL peut ainsi être transformée en SAS, ce qui entraîne plusieurs conséquences :

  • Modification du régime des titres sociaux : les parts sociales de la SARL deviennent des actions après transformation.
  • Changement des règles de gouvernance : une SAS bénéficie d’une plus grande liberté statutaire, contrairement à la SARL qui est strictement encadrée.
  • Conséquences fiscales et comptables : certaines opérations peuvent déclencher des droits d’enregistrement ou impliquer une réévaluation des actifs.

Quelle nature retenir en cas de cession des titres ?

La jurisprudence récente a clarifié un point essentiel : la nature des titres cédés doit être appréciée à la date du transfert de propriété, qui constitue le fait générateur des droits d’enregistrement.

En l’espèce, une SARL avait été transformée en SAS avant la cession des titres. L’administration fiscale avait pourtant estimé que la cession portait toujours sur des parts sociales de SARL, faute de publication immédiate de la transformation au registre du commerce et des sociétés (RCS). Cette approche a été censurée par la Cour de cassation, qui a rappelé que l’enregistrement d’un acte de cession ne modifie pas la nature des titres cédés si la transformation a bien pris effet avant la transaction.

A lire : Titres souscrits lors d’une augmentation de capital : quelle qualification comptable et fiscale ?

Les enjeux fiscaux et conséquences pour les parties à la cession

Différences de traitement fiscal entre parts sociales et actions

L’article 726 du Code général des impôts (CGI) prévoit des droits d’enregistrement différents selon que la cession porte sur des parts sociales ou des actions :

  • Parts sociales de SARL : soumis à un droit d’enregistrement de 3% après un abattement de 23 000 € sur la part proportionnelle de chaque associé.
  • Actions de SAS : soumis à un droit d’enregistrement forfaitaire de 0,1%, bien plus avantageux.

Si l’administration fiscale retenait la forme initiale de la société au moment de la cession, elle appliquerait donc une taxation plus élevée, ce qui peut représenter un coût significatif pour l’acquéreur.

Les risques en cas d’erreur dans l’enregistrement

Lorsque la transformation d’une société n’est pas immédiatement publiée au registre du commerce et des sociétés (RCS), l’administration fiscale pourrait être tentée de contester le statut juridique des titres cédés. Toutefois, la Cour de cassation a rappelé que le fait générateur des droits d’enregistrement est la date du transfert de propriété, et non la date de l’enregistrement de l’acte.

Les principaux risques sont les suivants :

  • Redressement fiscal : une requalification des titres pourrait entraîner un rattrapage des droits d’enregistrement, avec des intérêts de retard et des pénalités.
  • Contentieux avec l’administration : l’acquéreur pourrait être contraint de saisir le tribunal administratif pour contester une imposition excessive.
  • Incidence sur la valorisation des titres : en cas de doute sur la nature des titres, les investisseurs pourraient exiger une réduction du prix d’acquisition pour couvrir les risques fiscaux.

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Comment sécuriser une cession après transformation d’une société ?

Vérifications préalables et documentation essentielle

Afin d’éviter toute incertitude juridique et fiscale, il est recommandé de procéder à plusieurs vérifications avant la cession des titres :

S’assurer que la transformation est juridiquement effective avant la signature de l’acte de cession.
Vérifier que l’inscription au registre des mouvements de titres mentionne bien la nouvelle forme juridique de la société.
Préparer une documentation complète, incluant le procès-verbal de transformation et les nouvelles statuts enregistrés.

Précautions dans la rédaction de l’acte de cession

L’acte de cession doit préciser explicitement la nature des titres cédés et leur conformité à la forme juridique actuelle de la société. Il est conseillé d’y intégrer :

Une clause confirmant la transformation de la société avant la cession.
Une mention du régime fiscal applicable à la cession pour éviter toute ambiguïté.
Une garantie d’actif et de passif pour protéger l’acquéreur contre tout redressement fiscal futur.

A lire : Cession de droits sociaux après une transformation non publiée : détermination des droits d’enregistrement

Conclusion

La transformation d’une société a des implications majeures sur la nature des titres cédés et le traitement fiscal applicable. La jurisprudence récente rappelle un principe clé : c’est à la date du transfert de propriété que la nature des titres doit être appréciée, et non à la date de l’enregistrement de l’acte de cession.

Les vendeurs et acquéreurs doivent donc anticiper les formalités juridiques et fiscales pour éviter tout risque de requalification par l’administration. Un accompagnement juridique et fiscal est fortement recommandé pour sécuriser l’opération et garantir l’application du régime fiscal le plus avantageux.